Deux personnes sont mortes et deux autres ont été blessées, selon la police de Montréal, dans l'incendie qui a lourdement endommagé un immeuble de la rue Notre-Dame, dans le Vieux-Montréal, au cours de la nuit de jeudi à vendredi. Les deux personnes décédées seraient des ressortissants français, soit une mère et sa fille de 7 ans, selon nos informations.
La police a confirmé qu'elle a extrait deux corps des décombres vendredi soir. D'autres corps se trouveraient toujours dans les débris calcinés de cet incendie d'origine criminelle. Une des personnes blessées a été transportée à l'hôpital dans un état critique.

On s’attend à des décès, mais malheureusement, on n’est pas en mesure de confirmer leur nombre ni leur identité pour l’instant.
En conférence de presse vendredi après-midi, un inspecteur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), David Shane, n'avait confirmé aucune perte de vie, soulignant toutefois qu'il faut s'attendre à des décès
au fur et à mesure que l'enquête menée dans les décombres va progresser.
Un centre d’aide aux victimes et aux familles a été créé. Si vous croyez qu’un de vos proches aurait pu se trouver dans cet édifice lors de l’incendie, le SPVM vous invite à composer le 514 280-1294.
Les recherches se poursuivaient activement vendredi soir, selon l'inspecteur Shane, afin de déterminer avec exactitude le nombre de personnes qui étaient présentes dans l’immeuble au moment du déclenchement de l’incendie.

L'enquête a été prise en charge par la section des crimes majeurs, qui travaille en étroite collaboration avec le module des incendies criminels du SPVM. Une structure d’enquête spéciale baptisée FILET 4 a été dépêchée sur les lieux. Cette mesure s’applique seulement lors de circonstances qui nécessitent des ressources d’enquêtes extraordinaires, a précisé l'inspecteur Shane. Cette structure regroupe notamment des éléments du service des incendies, de la police, du coroner et du laboratoire de science judiciaire.
En raison de l'ampleur du brasier, les sapeurs n'ont pu commencer qu'en début d'après-midi à fouiller les décombres de l'immeuble qui abritait un restaurant au rez-de-chaussée et au moins 19 chambres en location de courte durée aux étages.
Il faudra plusieurs jours aux enquêteurs pour fouiller les décombres, prévient la police.
Le fil des événements
Selon nos informations, les flammes se seraient déclarées vers 2 h 39 du matin au rez-de-chaussée de l'immeuble. Le brasier se serait rapidement propagé dans ce vieil édifice de trois étages situé à l'angle des rues Bonsecours et Notre-Dame Est.
Selon les images obtenues à partir d'une caméra de surveillance, un homme a pénétré dans l'immeuble vers 2 h 33.

Thomas Sawer, un jeune touriste allemand présent au Canada depuis une semaine seulement, raconte avoir fui l'immeuble à toute vitesse.
La fumée commençait déjà à se répandre... J'ai vu une femme en pyjama, elle m'a dit qu'il y avait le feu à la cuisine, et quand on a regardé, il y a eu une explosion et le feu a éclaté. On s'est tous mis à courir
, a-t-il raconté à CBC News.
Une femme qui se trouvait dans l'immeuble voisin raconte avoir entendu un puissant boum
peu avant que des gens viennent frapper à sa porte pour lui dire de quitter les lieux sur-le-champ. Tout s'est passé très vite... Quand nous sommes arrivés dans la rue, l'immeuble était en flammes
, a raconté cette femme enveloppée dans une couverture de la Croix-Rouge.

Environ 150 pompiers ont été mobilisés pour éteindre les flammes qui ont rapidement gagné l'ensemble de la structure, du rez-de-chaussée jusqu'au toit.
Photo : Radio-Canada / Alain Béland
Originaire de l'Indiana, Clayton Anderson séjournait dans un Airbnb à proximité et a vu le bâtiment en flammes en rentrant chez lui hier soir.
Honnêtement, c'était terrifiant. [...] On avait peur, de l'endroit où on logeait, que ça se propage par le toit avec le vent. C’était vraiment très triste de voir les gens fuir cet endroit.
Le brasier dans ce quartier historique de la ville a nécessité le déclenchement d'une alerte générale et la mobilisation de plus de 150 pompiers. Environ deux heures trente après le début de l'incendie, une partie de la structure interne s'est effondrée.
Une trentaine de personnes, des clients de l'immeuble et des voisins, ont été évacuées et prises en charge par la Croix-Rouge.
Le 400-406, rue Notre-Dame Est est situé dans une zone protégée du Vieux-Montréal en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel. Le bâtiment date du XIXe siècle.
Selon le Répertoire du patrimoine culturel du Québec, cet immeuble de pierres grises au toit plat a été construit en 1862-1863 par Alexandre-Maurice Delisle, un homme d'affaires qui a aussi été député.
En plus de 150 ans d'existence, le bâtiment a notamment accueilli des épiciers, un aubergiste, des marchands et des artistes. Il a également abrité les bureaux de l'organisme Héritage Montréal dans les années 1980.

Le brasier a généré beaucoup de fumée dans les rues du centre-ville de Montréal.
Photo : The Canadian Press / Ryan Remiorz
Le même propriétaire que l'immeuble incendié de la place d'Youville
Selon le rôle foncier de la Ville de Montréal, le propriétaire de l'immeuble est Émile Benamor, également propriétaire de l'édifice William-Watson-Ogilvie, sur la place d’Youville, où sept personnes ont trouvé la mort et où neuf autres personnes ont été blessées lors d’un incendie criminel le 16 mars 2023.
Cet immeuble historique abritait plusieurs appartements loués sur Airbnb, où des irrégularités avaient été constatées par le passé.
Selon une poursuite pour négligence intentée par des familles des victimes contre le propriétaire Émile Benamor, contre Tariq Hasan – qui sous-louait les unités sur Internet – et contre la Ville de Montréal, l'immeuble aurait dû être condamné en raison de nombreuses irrégularités
qui avaient été constatées par le passé. Plusieurs victimes sont mortes piégées dans leur chambre, incapables de sortir de l'immeuble.
L'immeuble aurait aussi dû être retiré des plateformes Internet de location à court terme, estiment les familles, puisque ce type de location était interdite dans cette zone, selon le règlement de la Ville de Montréal.
Bien qu'un suspect ait été identifié par les policiers du SPVM, personne n'a encore été traduit en justice pour avoir allumé cet incendie criminel.
La mairesse de Montréal, Valérie Plante, s'est dite désolée de voir l'histoire se répéter avec le même propriétaire plus d'un an après l'incendie de la place d'Youville.
C'est une situation qu'on trouve absolument déplorable. On ne souhaiterait jamais qu'il y ait ce genre de situation deux fois en deux ans
, a-t-elle déclaré en point de presse vendredi après-midi.
Elle a refusé d'entendre les questions des journalistes sur place.
Si l'événement de vendredi a des similitudes avec celui de mars 2023, la différence cette fois-ci est tout le travail qui a été fait par le Service des incendies de la Ville de Montréal au niveau de la conformité
, a souligné Mme Plante.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a quant à lui publié ce message sur le réseau social X : Mes pensées vont aux victimes de l’incendie majeur dans le Vieux-Montréal
, a-t-il entre autres écrit.
Avec les informations de Jérôme Labbé